La plupart du temps, quand une vache boite, le problème se situe au niveau d’un ou plusieurs de ses pieds. Mais parfois la cause de sa boiterie est à rechercher « plus haut ».
On ne fera pas ici le catalogue complet de tous les traumatismes, infections, intoxications, anomalies génétiques, carences, etc. qui peuvent engendrer une démarche anormale chez les bovins. Seules les causes les plus fréquentes seront abordées.
Pour mettre en évidence une boiterie haute, la prise en compte des commémoratifs (événements précédents la boiterie) est importante : juste après le vêlage, vache en chaleur, glissade, coups de corne, etc…
Les boiteries hautes sont à gérer avec un vétérinaire.
Les arthrites sont des inflammations des articulations, généralement infectées chez les bovins.
Ce sont surtout les grassets et les jarrets qui sont touchés. Les arthrites et polyarthrites des jeunes bovins sont fréquentes. L’articulation est alors enflée, chaude et douloureuse. Parfois du pus s’écoule par une plaie. L’animal s’appuie moins, voire plus du tout, sur sa jambe et sa masse musculaire diminue. Il faut lui fournir un sol meuble et un couchage confortable.
Les arthrites sont généralement la conséquence d’une blessure de l’articulation ou d’une localisation secondaire d’une autre infection. Par exemple les germes d’un panaris peuvent remonter par voie sanguine et provoquer une arthrite du grasset.
Une arthrite peut devenir chronique. L’articulation devient alors moins chaude et moins douloureuse mais va s’ankyloser et la vache continuera de boiter. Généralement le mauvais état de l’animal conduit à une réforme précoce et dépréciée.
Un vétérinaire pourra essayer de ponctionner le liquide synovial de l’articulation. S’il n’y en a plus ou s’il contient des débris anormaux, cela confirmera le diagnostic. Le traitement consiste à injecter des antibiotiques par voie intramusculaire et à laver, voire nettoyer chirurgicalement l’articulation. Mais c’est une pratique peu réalisée car le pronostic est réservé, le traitement long et couteux et les rechutes fréquentes. Il vaut mieux réaliser des parages préventifs réguliers et fournir un logement confortable aux bovins.
Les luxations sont des « déboitements » des articulations ; le plus souvent de la hanche, plus rarement de la rotule chez les bovins.
Les ligaments qui normalement maintiennent les articulations en place sont alors distendus ou déchirés voire arrachés. De temps en temps on observe une épaule de vache qui semble démise, qui sort, mais cela reste rare. Presque toujours il s’agit en fait d’une position antalgique. C’est-à-dire qu’en réalité la vache souffre du pied et tord un peu la patte pour pouvoir appuyer là où ça lui fait le moins mal. Les luxations sont plus souvent observées chez les Prim’Holstein. Souvent, les vaches adultes ne réussissent plus à se lever.
Lors de la luxation de la hanche, la tête du fémur sort de son logement dans le bassin (l’acétabulum) et se retrouve généralement déplacée de quelques centimètres vers l’avant et le haut, parfois vers les bas et l’arrière. Ceci est douloureux, l’animal boite ou préfère rester coucher. On entend parfois des crépitements au niveau de la hanche. Il est possible, en appliquant correctement une force importante, de remettre la hanche en place sous anesthésie et de préférence dans les 24 h. On obligera alors la bête à rester coucher pendant 48 h pour limiter le risque de récidive qui est important.
Si on ne traite pas, l’animal reste couché ou boite et perd du poids. Parfois, avec un peu de chance, après plusieurs mois, l’articulation se fibrose et la douleur s’estompe. L’animal boite toujours mais moins, les muscles de sa patte restent partiellement atrophiés, mais globalement il reprend un peu d’état.
La luxation de la rotule, peu fréquente, concerne surtout les veaux ayant subi une extraction forcée au vêlage (par compression du nerf fémoral). Il peut aussi y avoir des malformations de l’articulation (probablement d’origine génétique). Dans ce cas, une intervention chirurgicale peut guérir l’animal.
Mais la luxation de la rotule s’observe aussi parfois sur des bovins adultes, comme la luxation de la hanche, suite à des chutes lors de glissades, de bagarres, ou de chevauchements par des congénères trop lourds.
On peut remettre la rotule en place avec certaines manipulations. Parfois même elle se repositionne spontanément et l’animal peut alors marcher normalement. Mais la plupart du temps c’est temporaire et la rotule finit par « sauter » sur le côté en émettant un claquement sourd qui s’entend à plusieurs mètres. L’animal recommence à boiter et avec le temps s’amaigri.
Les arthroses sont des atteintes des cartilages qui touchent généralement les articulations des hanches, grassets et jarrets chez des animaux qui prennent de l’âge. Comme chez les humains il semble y avoir une composante héréditaire. Des traumatismes ou des infections passées peuvent favoriser l’apparition de l’arthrose.
On observe une boiterie qui apparait progressivement, qui persiste et qui s’aggrave doucement. Avec le temps, l’articulation atteinte peut enfler et/ou se déformer.
La douleur est souvent importante, l’animal rechigne à se déplacer voire à se coucher, et parfois on peut entendre des bruits de crépitation lors de ses déplacements. Les muscles des membres touchés fondent. Les anti-inflammatoires peuvent diminuer la douleur, mais il n’y a pas de traitement et il faut envisager la réforme.
Les factures sont fréquentes en élevage bovin. Chez les adultes elles sont la plupart du temps causées par des chutes. Chez les veaux, elles font souvent suite à des accidents de vêlage, notamment lors d’extraction forcée, ou à des écrasements par des adultes lors de bousculades.
Elles ne sont pas toujours simples à confirmer, surtout sur un bovin adulte qui a des masses musculaires importantes. Les os les plus touchés sont les fémurs, les tibias et les os du canon. La fracture peut être ouverte avec un morceau d’os qui sort de la peau ou à l’opposé partielle et parfois difficile à déceler.
Quand le diagnostic de fracture est posé sur un bovin adulte, l’abattage d’urgence est souvent à envisager. En revanche, on peut parfois soigner les fractures des veaux au moyen de résines /plâtres/fixateurs externes.
L’ostéomalacie (peu fréquente) est une décalcification des os due à un trouble du métabolisme du calcium et du phosphore. Elle est rare et généralement induite par une ration insuffisamment pourvue en phosphore, calcium et/ou vitamine D. Les vaches boitent, les jarrets sont tournés en dedans, le dos est rond et le risque de fracture est augmenté.
Les hématomes musculaires peuvent aussi faire boiter. Un coup (ex : coup de corne) provoque la rupture d’un ou plusieurs vaisseaux sanguins, d’où cumul de sang dans les tissus (si le saignement à l’intérieur du muscle est important la vache peut avoir une poche de 10, 20 voire 40 litre et plus de sang !) Si on souhaite drainer l’hématome, le vétérinaire attendra 10 à 15 jours avant de le percer pour éviter que le saignement reprenne. Il utilisera aussi du désinfectant et du matériel stérile car un hématome peut vite se transformer en abcès. Si on ne fait rien, l’hématome sera résorbé et laissera une cicatrice fibrosée, épaisse, visible au niveau de la peau.
Les abcès musculaires sont des infections localisées. Lorsqu’un corps étranger (barbelé, aiguille non stérile, parasite…) lèse la peau, il introduit des bactéries dans le muscle et l’organisme du bovin se défend en les encapsulant dans une coque fibreuse. Il est parfois difficile de différencier à l’œil et même au toucher un abcès d’un hématome. Dans le doute un vétérinaire essaiera de prélever un peu de liquide avec une aiguille et une seringue stérile.
Les déchirures musculotendineuses surviennent lors de chutes, de mouvements brusques, de chevauchements, de bagarres, de coup de pied vers l’arrière sur un objet tranchant…
Un muscle ou son tendon sont lésés : écrasés, distendus, déchirés ou coupés.
Immédiatement, l’animal qui souffre, se met à boiter. Le tendon le plus souvent touché est la corde du jarret, le muscle est le gastrocnémien (mollets). Dans certains cas, une contracture réflexe du muscle accentue la boiterie.
En cas de rupture complète du muscle ou du tendon on envisage la réforme, voire une euthanasie si deux membres sont touchés en même temps.
Sinon on peut espérer une guérison lente en 1 à 2 mois, par fibrose, à condition de laisser l’animal au repos sur un sol meuble avec un couchage confortable.
Une injection intramusculaire mal réalisée, au mauvais endroit, ou avec un produit irritant peut faire suffisamment mal pour engendrer une boiterie. De plus, une injection dans le cou peut parfois entrainer une raideur faisant penser à un corps étranger.
La maladie du muscle blanc est une carence en vitamine E et Sélénium.
Elle concerne surtout les jeunes bovins à forte croissance de 6 mois à 2 ans.
Leur démarche est alors raide, ils souffrent de paralysies, de tremblements, et passent beaucoup de temps couchés. Un apport en vitamine E et en Sélénium permet généralement une amélioration rapide.
Les tarsites et hygroma sont des œdèmes qui se développent au niveau des jarrets (tarsite ou « gros jarret ») ou plus rarement des genoux (hygroma). L’œdème est généralement modéré et mesure quelques centimètres de diamètre. Plus rarement il peut atteindre plusieurs dizaines de centimètres de diamètre. Contrairement aux idées reçues, ces lésions ne font pas boiter les bovins, à moins qu’elles n’évoluent en arthrites. La plupart du temps, c’est parce que le bovin boite qu’un « gros jarret » se développe. En effet une vache boiteuse ayant plus de mal à se coucher et à se relever, son jarret ou son genou va frotter et taper plus et plus souvent sur le sol du lieu de couchage. Jour après jour, choc après choc, l’œdème va se développer. Ce phénomène est plus souvent observé en logettes qu’en aires paillées. Bien régler les logettes et les garnir d’un épais lit de paille, et éventuellement de matelas, permet de ralentir fortement l’apparition des tarsites. Néanmoins il faudra surtout gérer la cause des boiteries (dermatite digitée, fourchet, fourbure, etc.)
Les oedèmes mammaires modifient la démarche des vaches, surtout au niveau des postérieurs qu’elles essaient d’écarter. Le frottement contre l’intérieur de la cuisse provoque souvent des lésions cutanées très douloureuses. Cela se soigne comme une plaie cutanée mais le mieux est encore de travailler sur les rations et l’état corporel des bêtes pour éviter autant que possible les œdèmes.
Les coupures sont assez fréquentes, avec des bouts de ficelles qui trainent par exemple. Les bovins qui se prennent les pieds dedans en marchant peuvent subir une entaille de la peau au niveau des os du canon. Cela se soigne comme une simple plaie cutanée mais le mieux est d’éliminer les morceaux de ficelle errants.
Lorsque le nerf d’un membre est atteint, il peut provoquer l’apparition d’une boiterie. Celle-ci est souvent difficile à distinguer d’une boiterie d’origine musculaire, les 2 étant parfois associées. Les boiteries d’origine nerveuse sont plus fréquentes au niveau des postérieurs. Les causes sont diverses et souvent liées à des suites de vêlage difficile, une chute (la vache «équasillée » ou écartelée a en général fait un grand écart involontaire, brutale et particulièrement douloureux lors d’une chute sur un sol glissant), une injection mal effectuée, un décubitus prolongé… Les symptômes sont spécifiques au nerf atteint.
Membre postérieur |
Membre antérieur | ||||
Nerf obturateur | Nerf sciatique | Nerf péronier | Nerf tibial | Nerf radial | |
Origine de la lésion du nerf | Dysctocie (difficulté au vêlage) | Fracture du bassin | Chute
Décubitus post-partum (suite au vêlage) |
Animal qui se débat violemment sur le sol | Décubitus latéral prolongé.
Fracture de l’humérus. |
Atteinte induite | Paralysie des muscles adducteurs des postérieurs | Perte presque totale de la motricité et de la sensibilité du postérieur | Paralysie des muscles fléchissant le jarret et tendant les doigts | Paralysie des extenseurs du jarret et des fléchisseurs des doigts | Paralysie des extenseurs. |
Signes cliniques associés | Abduction souvent bilatérale des membres postérieurs, incapacité éventuelle de se relever. | Perte de la sensibilité cutanée, sauf en région externe de la hanche et de la cuisse. Membre trainé par l’arrière | Flexion du boulet.
Perte de sensibilité cutanée sur la face dorsale du boulet et des doigts. |
Flexion exagérée du jarret et du grasset, démarche saccadée. Perte de sensibilité cutanée en face plantaire du métatarse et des doigts |
Incapacité à avancer le membre, affaissement du coude. |
Perte de la sensibilité cutanée en face dorsale de la main. |
Arqures et bouletures : il s’agit de raccourcissements ou de rétractations de certains tendons qui provoquent une posture anormale. Le carpe (arqûre) et/ou le boulet (bouleture) sont les articulations les plus fréquemment atteintes. Ces contractures sont le plus souvent d’origine congénitale et s’observent surtout chez les veaux. On peut cependant parfois en rencontrer chez les bovins plus âgés suite à un traumatisme, et notamment des lésions nerveuses.
La parésie spastique ou jarret droit est une maladie à l’origine mal connue, peu fréquente, touche principalement les bovins de 6 à 20 mois environ. Un, ou les deux muscles gastrocnémiens (mollets), se contractent involontairement et de plus en plus au fur et à mesure que le temps passe. L’animal a de plus en plus de mal à fléchir le jarret qui est de plus en plus « droit ». Une boiterie apparait, ainsi qu’un retard de croissance de plus en plus important. Un traitement chirurgical au début de la maladie peut sauver sa carrière.
Il ne faut pas confondre cette maladie avec « les crampes ».
Le syndrome spastique périodique ou « crampes ». Ce sont les bovins adultes qui sont touchés, surtout en race Holstein après le 3eme vêlage. On soupçonne une prédisposition génétique.
Une peur ou une douleur soudaine peuvent déclencher une crise. La maladie des crampes se voit principalement aux cornadis où les vaches semblent essayer de détendre leurs membres postérieurs en les étirant vers l’arrière. D’où l’expression communément utilisée : « elle a des crampes ». Elles tremblent parfois énormément à force de rester debout bloquées. Lors des crises, la vache peine à se déplacer, le reste du temps elle marche normalement. Avec le temps les crises ont tendance à se rapprocher. Cette maladie semble actuellement en recrudescence et est étudiée.
Une douleur viscérale forte, provoquée par un corps étranger, une infection, une intoxication, etc. peut provoquer indirectement une boiterie. L’animal qui soufre arrondi alors le dos et marche doucement à petit pas.
Certaines maladies ou intoxications rares peuvent être à l’origine de boiteries hautes. Parmi celle-ci, quelques-unes peuvent être citées mais ne seront pas développées :